La période actuelle(1) a ceci d’intéressant que certains aspects des plus anodins ou des plus obscurs de la vie politique et institutionnelle, auxquels les manuels ne consacrent généralement que quelques lignes, prennent soudain une importance démesurée. Les médias s’en font l’écho à longueur de pages ou de sujets télévisés ; les juristes – principalement les constitutionnalistes – connaissent leur quart d’heure de gloire, en dépit d’une incapacité à s’accorder sur une position commune qui les rendrait presque comparables aux leaders du Nouveau Front populaire.
Ce fut, dès 2019, puis en 2023 et en 2024, le référendum d’initiative populaire ; puis le périmètre des projets de loi de financement rectificative de la Sécurité sociale ; et enfin, la jurisprudence sur les cavaliers législatifs. Aujourd’hui, alors que le président de la République a pris le 16 juillet, un décret mettant fin aux fonctions du président du Gouvernement Attal, c’est au tour de la situation du gouvernement démissionnaire d’être placée sous les feux de la rampe et de tenir en haleine l’opinion. D’ordinaire, il n’y a là rien qui puisse passionner les foules : le gouvernement démissionnaire ne demeure en fonctions que quelques jours – le nouveau gouvernement étant nommé presque immédiatement après (y compris lorsque, comme ce fut le cas au début de l’année, les secrétaires d’Etat et ministres délégués ne sont nommés que dans un second temps). Or la situation est exceptionnelle : la France risque de connaître un scénario que connaissent bien ses voisins européens, à savoir une longue période de transition destinée à faire émerger un consensus (ou pas) entre les partis sur le nouveau gouvernement.
Un auteur éminent s’est d’ailleurs élevé contre cet abandon par le Président de son pouvoir d’initiative, puisqu’il dispose en droit du pouvoir discrétionnaire de nommer la personne de son choix. Il demeure que cet entre-deux est voué à durer et qu’il soulève un certain nombre de questions épineuses.